UNE VIE APRÈS LE HOCKEY

MATHIEU HOTTEGINDRE
D’ABORD REPÉRÈ POUR SES TALENTS SUR LA GLACE, MATHIEU HOTTEGINDRE A TROQUÉ SES PATINS DE HOCKEY POUR LES CLÉS DE L'IMMOBILIER À L’AUBE D’UNE CARRIÈRE PROMETTEUSE. LE SAINT-GERVOLAIN A EN EFFET CHOISI UNE VOIE MOINS BALISÉE MAIS TOUT AUSSI COMPÉTITIVE : CELLE DE L'ENTREPRENEURIAT. CO-FONDATEUR DE L'AGENCE IMMOBILIÈRE « MAT&SEB", SA RECONVERSION FAITE DE RISQUES CALCULÉS ET D'UN FLAIR POUR LE COMMERCE AUSSI AIGUISÉ QUE SES ANCIENS PATINS, SE RÉVÈLE PLUTÔT RÉUSSIE.

Qu’est-ce qui vous a motivé à choisir le hockey comme carrière sportive ?

Je suis originaire de Saint-Gervais les-bains, c’est un petit village entre Chamonix et Megève. Làbas, quand tu es jeune, il n’y a pas de possibilité. C’est soit le ski, soit le hockey. Mon père avait déjà embrassé une carrière de skieur professionnel et entraînait l’équipe nationale. J’ai choisi la glace.

Pouvez-vous nous parler un peu de votre parcours dans le hockey ?

J’ai commencé jeune, à l’âge de six ans. À quatorze ans, je suis pris au centre de formation de Rouen, l’un des plus grands clubs français et même européens.

À ce moment-là, visez-vous une carrière pro ?

Oui, je veux en faire mon métier. Mais il faut se remettre dans le contexte. À l’époque, c’est une discipline qui n’est pas autant répandue qu’aujourd’hui. Elle se professionnalisait, mais nous n’avions pas beaucoup de visibilité. À l’international les joueurs français n’étaient pas vus. On était dans les compétitions mais souvent en 2e division au niveau des équipes nationales.

Et ensuite ?

Au bout de deux ans, j’ai commencé à approcher l’équipe professionnelle. J’ai été quatre fois vice-champion de France élite dont deux alors que j’étais encore mineur et une fois champion de France élite. En fait j’ai eu pas mal de médailles mais elles sont toutes en argent ! (Rires) Et puis je suis parti sur un gros championnat européen en Suisse en pro à l’âge de dix-huit ans. Je pense que j’étais d’ailleurs trop jeune pour partir. J’ai fait un petit peu moins d’une saison à Genève où là c’était vraiment du professionnel, comme on peut le voir sur tous les autres sports pros à l’heure actuelle. Je suis reparti une demi-saison sur Rouen avant d’intégrer l’équipe de Gap. Finalement j’ai mis ma carrière de côté en arrivant à Montpellier où j’ai joué une saison en parallèle de mes études.

À l’époque vous êtes encore très jeune. Qu’est-ce qui va vous pousser vers une reconversion ?

Quand j’étais à Gap, je devais partir à la fin de ma deuxième saison dans un autre gros club français. Mon ex-compagne, qui devait me suivre, a finalement décidé de s’installer à Montpellier pour ses études. Je l’ai suivie par amour. En fait j’en ai eu un peu ras-le-bol. Je pense que j’ai commencé le pro trop jeune et cela m’a un peu cassé. À la vingtaine, j’ai pris conscience que je pouvais vivre de mon métier mais que cela ne durerait pas. Il me fallait penser à l’avenir.

Comment allez-vous vivre cette transition ?

Assez bien. En fait, j’ai été soutenu par la Fédération de hockey à l’époque. J’ai été suivi pendant un an par une psychologue du sport qui m’a aidé à m’orienter vers la bonne formation. Au départ, j’ai fait les deux. Je jouais et je préparais mon BTS en alternance dans l’immobilier. Puis cela a commencé à être un peu lourd. J’ai été entre les deux un moment et j’ai arrêté pour monter mon agence.

Pourquoi allez-vous choisir l’immobilier ?

Le commerce, c’est quelque chose qui m’a toujours plu. J’aimais l’architecture, la décoration et par-dessus tout le contact humain. Je ne voulais pas être enfermé derrière un bureau. C’était logique.

Vous faites des liens entre le monde du sport et celui de l’immobilier ?

Oui. C’est hyper concurrentiel, il y a une pression constante aussi. La psychologue qui m’avait suivi à l’époque m’avait dit qu’en effet, ce type de métier pourrait me plaire par rapport à mon état d’esprit, ma mentalité et mon parcours de sportif.

Quels ont été les défis majeurs auxquels vous avez été confronté lors de cette transition ?

Eh bien, de changer complètement de vie ! Quand tu es sportif, tu es dans un microcosme. On n’est pas sur le même rythme et on est toujours en équipe. Je ne savais pas si j’allais réussir à vraiment m’adapter à cette nouvelle vie. L’appartenance à une équipe, c’est quelque chose de très fort. Tu crées des liens que tu ne retrouves pas dans un milieu professionnel. C’est peut-être ce qui m’a le plus manqué quand j’ai arrêté. Cela et l’état d’esprit. Depuis l’âge de quatorze ans, on m’a éduqué à être constamment dans la performance, à me remettre sans cesse en question, à travailler… encore et encore.

Votre entourage ? Qu’a-t-il pensé de ce choix ?

Au départ, j’ai eu beaucoup de coéquipiers qui m’ont dit que je m’arrêtais beaucoup trop jeune et que je commettais une erreur. La Fédération de hockey a essayé de me retenir aussi… c’était bienveillant. Ma famille m’a plutôt encouragé à reprendre justement mes études.

Vous n’avez pas eu peur justement de « faire une erreur » ?

Non, pas à ce moment-là en tout cas. Quand j’ai pris ma décision, j’étais sûr de moi. J’étais un peu usé. Après avoir démarré l’agence, même si tout se passait super bien et que j’étais très heureux, quand j’ai vu certains coéquipiers participer aux JO, aux championnats du monde… je me suis dit « c’est con, j’ai loupé certains trucs, j’aurais peut-être pu faire un peu plus ». Mais c’est sans regrets.

Vous jouez encore pour le plaisir ?

J’ai totalement arrêté pendant cinq ans. Mais je m’y suis remis le dimanche pour le loisir avec une équipe de vétérans. Il y a pas mal d’anciens joueurs avec un bon niveau, cela me permet de rester un peu sur la glace.

Comment analysez-vous l’évolution du hockey en France ?

Tous les clubs se sont vraiment professionnalisés. Il y a plus d’argent, plus de visibilité. À l’époque où j’ai commencé, il n’y avait pas de fédération de Hockey. Il y avait une fédération des sports de glace. Aujourd’hui elle existe et cela a fait bouger les lignes. Les matchs de championnats sont diffusés sur des chaînes à grande audience comme l’Équipe 21. En quinze ans, le hockey français a pris beaucoup d’ampleur. Et les joueurs sont bons ! On est dans le top 10 à l’échelle internationale.

En 2011, juste après vos études, vous créez l’agence Mat&Seb…

C’est ça. Pour la petite histoire, j’ai effectué mon alternance chez Seb qui avait une agence à Sète. Il l’a vendue, nous nous sommes recroisés un peu par hasard et nous avons lancé Mat&Seb. Aujourd’hui nous avons trois agences. La première, c’est l’historique, c’est celle de Montpellier. On ne peut pas trop nous louper, nous sommes tout en rose ! Nous roulons avec des vespas roses ! Depuis nous nous sommes aussi implantés à Nîmes et Marseille.

Vous êtes spécialisés ?

Oui dans l’immobilier de charme, l’immobilier atypique et l’immobilier urbain. Nous avons une clientèle plutôt décalée. Des personnes qui cherchent des lieux qui sortent de l’ordinaire et qui sont un peu à leur image. Attention par contre, nous ne sommes pas spécialisés dans le luxe. Nous avons aussi du studio ! (Rires) Nous ne faisons pas de location. Nous nous différencions par le côté atypique de nos biens et par notre connotation gay-friendly.

Expliquez-nous…

On a voulu jouer sur les codes, mon associé Seb est gay, moi je ne le suis pas. Je viens d’un milieu de sportifs, généralement un peu homophobe. Nous avons voulu montrer notre ouverture d’esprit, que la différence, c’est bien. Nous faisons de l’immobilier glamour !

Avez-vous des projets ?

Des projets, on en a toujours. Sinon tu n’avances pas ! Nous aimerions ouvrir de nouvelles agences dans des villes qui nous plaisent avec certainement une licence de marque. Nous voulons continuer à nous faire plaisir. Avoir des partenaires et des collaborateurs qui sont dans le même état d’esprit que nous.

Quel serait votre conseil pour une reconversion réussie ?

Déjà, c’est bien d’y penser et de l’anticiper. D’être bien accompagné, d’y croire et de se dire que le sport c’est tellement une bonne école de la vie, qu’à partir du moment où l’on croit en quelque chose, à un nouveau projet, il n’y a aucune raison qu’il n’aboutisse pas.

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